Depuis le début de la guerre en Ukraine, nous voulions écrire sur le sujet. Mais comment s’y prendre ? Analyser le conflit ? D’autres le font bien mieux que nous. Parler des femmes ? Malheureusement c’est un sujet bien plus large.

Puis, nous nous sommes rendues compte qu’il y avait énormément de façons d’aider la population ukrainienne, et que nous avions du mal à nous y retrouver. Comment faire le bon choix pour être vraiment utile ? Nous avons donc demandé à une experte de nous éclairer sur le sujet.

Louise Ricard travaille chez Handicap International. Après plusieurs années sur le terrain au Mali, au Congo puis au Liban, elle travaille aujourd’hui au pôle éthique de l’ONG.

 

Est-ce que les milliers de dons matériels envoyés en Ukraine sont aussi utiles qu’on ne le pense ?

 

Depuis le début du conflit en Ukraine c’est un bel élan de générosité et de soutien qui souffle sur la population ukrainienne. Convois, dons, envois de biens de première nécessité : qui n’a pas encore vu une collecte dans un supermarché, à l’école ou chez son médecin? Le sentiment et le geste sont évidemment honorables, mais malheureusement, non, tout n’est pas utilisé et utile comme on l’imagine. 

Un ami humanitaire actuellement sur place m’a raconté pas plus tard qu’hier qu’« une ONG est en train de déballer les cartons envoyés, et oui, il y a des tubes de dentifrice et des brosses à dent usagées… » En plus de ces dons inutilisables, beaucoup de cartons n’ont pas survécu au voyage, et le tri entre les différents biens reste le cauchemar des meilleurs logisticiens et logisticiennes !

 

Mais les Ukrainiens n’ont-ils pas besoin de tous ces produits de première nécessité ?

 

Si bien sûr. Mais de l’autre côté de la frontière, dans les pays d’accueil, en Moldavie, en Pologne ou en Roumanie, ces biens existent et sont disponibles. Leur achat sur place pourrait servir à l’économie de ces pays qui sera probablement affectée par une arrivée massive de réfugiés. Et on connaît malheureusement la chanson : si le conflit dure, l’accueil généreux et ouvert des pays voisins peut vite se transformer en tensions entre communautés hôtes et réfugiés.

 

Alors comment faire pour aider au mieux sur place ?

 

Il faut évidemment garder cet élan de générosité, mais pour aider au mieux, il faut donner de l’argent, et le donner à des associations présentes sur place.

C’est d’ailleurs ce que conseille les Nations Unies depuis 2016 : l’aide humanitaire doit être locale, pour être au plus proche de la réalité des besoins, apporter des réponses rapides et amplifier la voix des communautés. L’aide apportée doit être en cash, pour permettre de renforcer les marchés locaux, offrir un plus grand choix et une plus grande autonomie aux personnes touchées.

 

Que répondez-vous aux personnes qui préfèrent donner des bien matériels car ils craignent de ne pas savoir où va leur argent ?

 

Je les comprends. Bien sûr ce n’est pas simple, de donner votre argent, sans savoir précisément à quoi il va servir. Pour prendre un exemple plus proche de nous : pour un SDF, donne-t-on plutôt un ticket restaurant pour « contrôler » cette dépense (de la nourriture) ou donne-t-on de l’argent, car qui mieux que les personnes concernées pour connaître leurs besoins ? Alors, à nous d’avoir confiance sur l’utilisation de cet argent, il en va de la dignité des Ukrainiens et des Ukrainiennes !

 

Ces conseils s’appliquent pour aider directement sur place. Comment aider les Ukrainiens qui arrivent jusqu’à chez nous ?

 

Là, c’est la même règle : préférer donner aux associations spécialisées dans l’accueil des réfugiés, en fonction de leurs besoins. Et pourquoi pas donner un peu de son temps… pour aider à trier les cartons ?

 

 

Quelques exemples d’associations sur le terrain :

> En Ukraine

Croix Rouge Ukrainienne

Croix Rouge Française

Alliance Urgences

 

> En France pour les réfugiés

La Cimade