Sophie a 31 ans. Si elle avait été un garçon, elle se serait appelée Alexandre et Sophie trouve ce prénom joli. Un peu désuet peut-être. Mais royal. 4 syllabes. Un prénom plein de promesses.

Sophie a grandi dans le Sud-Ouest de la France, à Lescar exactement, une petite ville près de Pau. C’est là que cinquante ans plus tôt, ses grands-parents maternels ont décidé de s’installer, pour fuir la misère d’un Portugal sclérosé par la dictature.

Aujourd’hui, Sophie vit à Paris. Plus exactement à Boulogne-Billancourt où elle a emménagé il y a quelques mois, après avoir acheté un appartement avec son mari. A Boulogne, il y a beaucoup de chiens, et au bout de leur laisse, de vieilles dames élégantes. Il y a aussi beaucoup de poussettes. Sophie elle, n’a ni chien, ni enfant, seulement un gros chartreux gris qui a l’air de sourire tout le temps. Elle qui a longtemps vécu dans le 2ème arrondissement de Paris, se sent parfois un peu en décalage.

Sophie a fait deux ans de classe préparatoire avant d’intégrer une école de commerce. Pas franchement une vocation, mais plus jeune, elle s’imaginait affairée, un dossier sous le bras, vêtue d’un tailleur bien coupé et d’une paire de hauts talons dans de grands bureaux aseptisés. C’était son image du succès.

À la fin de ses études, Sophie décroche un CDI dans un grand groupe de cosmétiques en tant que chef de produit marketing. Mais au bout de trois ans et demi, elle ressent le besoin d’être davantage stimulée, d’apprendre plus et de digitaliser son parcours. Elle démissionne et rejoint la FNAC où elle occupe un poste de chef de projet marketing dans l’univers du Livre. Avec cet emploi, Sophie revient à ses premières amours : la littérature.

Pendant 3 ans elle s’épanouit dans ses missions, mais un jour, un de ses anciens managers l’appelle et lui propose de le rejoindre en qualité de responsable marketing pour une marque de cosmétiques. Sophie se dit que si elle est prise aux entretiens alors c’est qu’elle doit tenter cette nouvelle aventure. Ce qu’elle fait.

Toutefois, Sophie n’y reste que quelques mois car ce même manager la débauche à nouveau pour le suivre dans une entreprise spécialisée dans les huiles essentielles. Elle accepte sur un coup de tête mais décide finalement de tout quitter au bout d’un an car elle juge le management à l’opposé de ses valeurs.

Actuellement, Sophie écrit, lit, va au théâtre et au cinéma, prend des cours de bricolage, fait du sport, achète des fleurs, sort danser, voyage, cuisine, passe des vrais moments avec sa famille et ses amis, s’essaie à la méditation… Elle prend le temps de prendre son temps et s’oblige à faire toutes les choses dont elle a toujours rêvé. Elle est aussi en processus de recrutement pour un poste qui lui plairait beaucoup mais par superstition, elle préfère ne pas en parler pour l’instant.

Demain, Sophie s’imagine s’expatrier à l’étranger, voyager encore plus, rencontrer des gens inspirants, acheter une poussette, écrire, occuper un poste dans un domaine qui la passionne : l’Art et de la Culture.

Là où la vie l’emmènera.Ou bien là où elle emmènera la vie avec elle. 

 

Une peur ? J’ai peur du vide. J’ai le vertige, et la solitude m’angoisse. Je me suis d’ailleurs inscrite dans une association qui s’appelle Voisin’Age et qui vient en aide aux personnes âgées isolées.

Un rêve ? Les réaliser tous.

Une réussite ? Mes amitiés. Sincères, absolues et solides. Je les chérie tant.

Un regret ? Aucun. Je me suis toujours efforcée de vivre de manière absolue, pleinement, et sans compromissions.

Une héroïne ? Ma grand-mère. Je l’ai malheureusement perdue le 15 novembre dernier mais elle m’a toujours beaucoup impressionnée. Elle était drôle et très peu conventionnelle, moderne, avec un esprit très libre. Elle était pleine de poésie, aussi, et très bavarde. Il émanait d’elle une grande assurance et elle était très obstinée à vivre sa vie comme elle l’entendait. Par exemple, à l’époque, sa mère avait voulu la marier avec un grand avocat qu’elle détestait et qui avait demandé sa main.  Pour se sortir de cette situation, elle m’a raconté qu’elle avait décidé de se faire passer pour une fille de petite vertu et qu’elle avait dansé avec tous les garçons lors d’un bal, en minaudant de sorte à le dissuader de vouloir l’épouser. Elle a même été plus loin en demandant à un de ses amis de faire croire qu’elle avait passé la nuit avec lui. Rien de choquant en 2019 mais imaginez cette situation dans le Portugal puritain et conservateur de la dictature salazariste ! En tout cas, ça a suffi à choquer notre Dom Juan duquel elle n’a plus jamais eu de nouvelles. De manière un peu plus générale, j’ai un mélange de fascination et d’admiration pour les personnages féminins passionnés, sulfureux et irrévérencieux. Françoise Sagan, Gala Dali ou encore Colette m’inspirent beaucoup dans leur empressement à vivre et la jouissance de leur liberté, en dépit des mœurs et du quand dira-t-on.

Une anecdote ? Les loutres se tiennent la main quand elles dorment pour ne pas être emportées par le courant. C’est fou, non ?

Une manie ? Je ne touche jamais les images de serpents dans les livres ou les magazines et si par mégarde, je touche l’image, je dois aller me laver les mains.

Une habitude ? C’est une habitude récente. Il y a trois mois, j’ai décidé de faire chaque jour quelque chose qui me faisait peur. Ca peut être de toutes petites choses anecdotiques comme manger toute seule dans un restaurant par exemple, ou faire un plongeon du haut d’un rocher mais aussi des choses un peu plus importantes comme livrer un sentiment alors que j’ai peur du rejet ou du ridicule. 

Un livre de chevet ? Le prophète de Khalil Gibran. C’est un livre un peu hybride, poétique et philosophique. Je relis souvent des passages. Et en ce moment, l’Âge d’Or de Diane Mazloum.

Une musique ? 19 dias et 500 noches de Joaquin Sabina. J’ai rencontré quelqu’un qui avait ces mots tatoués près du cœur. La chanson évoque le chagrin d’amour, celui d’une vie, sans tomber dans les clichés et avec beaucoup de poésie.

La dernière chose qui t’a inspirée ? La rencontre avec le fleuriste en bas de chez moi, un iranien d’une soixantaine d’années dont la boutique semble tout droit sortie d’un roman de Tolkien. Il a l’habitude de s’asseoir devant sa boutique, sur une petite chaise en bois bleue. Je le croisais souvent et lui adressais un sourire un peu timide et un jour, il m’a interpellée pour me dire que j’avais toujours l’air pressée. Nous avons échangé et depuis, il a installé une deuxième chaise sur le trottoir. Comme ça, je prends le temps de ralentir et de l’écouter. C’est un homme plein de sagesse.

Autre chose à dire ? « Celui qui n’est pas occupé à naître, est occupé à mourir », c’est de Bob Dylan et c’est plein de bon sens.

 

***

Vous voulez être la prochaine Girl Next ? Écrivez-nous à hello@frenchcuriosityclub.com

Pour participer, aucune condition. Il suffit juste d’être vous ! Et de nous accorder un peu de temps pour une interview 😉

 

Un portrait signé Sophie Astrabie.